The commitment of political parties to field an equal number of women and men in the federal elections had never been higher than this year: 45% of women on the electoral lists, totaling 595 women and 729 men. A record!
Les pronostics annonçaient pourtant un certain repli de la vague violette, et les résultats l’ont confirmé. Il est donc intéressant de se questionner sur les défis que représente la présence de femmes dans les fonctions politiques. Car un paradoxe perdure : alors qu’elles sont de plus en plus présentes sur les listes électorales, leur nombre reste inférieur à celui des hommes parmi les élu·es. On peut ainsi se demander pourquoi nous continuons de voter majoritairement pour des hommes.
État des lieux
La Suisse a connu une évolution progressive de la représentation des femmes au Parlement fédéral, bien qu’à des rythmes différents, à la fois entre ses deux chambres, mais également entre les différents partis politiques. Depuis les dernières élections fédérales de 2019, environ 42% des sièges du Conseil national ont été occupés par des femmes, marquant une progression significative par rapport aux années précédentes (32% en 2015, 29% en 2011), mais en 2023, ce chiffre recule à 38,5% (78 femmes), montrant bien que l’évolution n’est jamais linéaire. Le deuxième tour au Conseil des États a finalement créé un effet de surprise : la Chambre haute compte désormais 16 sénatrices, un résultat historique, mais qui reste relativement faible au regard de l’équilibre de la population.
Il est important de mentionner que l’année 2019 avait été marquée par des mobilisations citoyennes, notamment autour de la grève des femmes, qui ont donné un souffle nouveau aux thématiques liées à l’égalité, en la repositionnant comme enjeu prioritaire. Et cela s’est vu dans les urnes ! Il semble, a contrario, que le contexte de 2023 voie un essoufflement de cette tendance, voire un « ras-le-bol » de certaines franges de la population sur ces sujets.
Mais alors, pourquoi les hommes restent-ils surreprésentés dans les fonctions politiques ?
Imaginez un monde où, afin d’être élu·e, il suffit d’être inscrit·e sur une liste électorale. C’est évidemment un peu plus complexe ! Pour les hommes, comme pour les femmes. Le chemin semble toutefois un peu plus sinueux pour les femmes… Premier élément aventureux : les barrières culturelles (stéréotypes de genre et préjugés) influençant directement les consciences collectives en limitant à la fois l’engagement des femmes en politique, mais également la confiance des électeurs et électrices dans les capacités des femmes leaders. De la même manière, les attentes traditionnelles de la société viennent exiger une sorte de « double devoir » de la part des femmes : celui de devoir jongler entre leur vie domestique et une carrière politique très accaparante. Le système de milice, pilier du système helvétique, accentue cette double charge, dissuadant certaines femmes de s’engager en politique.
Ajoutons à cette conjoncture culturelle les biais institutionnels. Leur rôle est en effet important ; le système favorisant des député·es sortants et désavantageant les nouveaux et nouvelles candidat·es, dont les femmes. Le principe d’ancienneté a en ce sens entravé l’obtention des postes de pouvoir pour les femmes « arrivées plus tard ». L’effet « vague violette » de 2019 s’explique d’ailleurs aussi, en partie, par la plus grande proportion de places vacantes cette année-là. Cependant aujourd’hui, sur les 200 sièges du Conseil national, seul un petit tiers était à pourvoir (171 des membres du Conseil national – 69 femmes et 102 hommes – se présentaient pour une réélection). Dans ce tiers, la proportion de femmes ne pouvait donc augmenter significativement que si elles obtenaient le plus grand nombre possible de sièges à pourvoir. Les chances d’une augmentation de la représentation féminine en 2023 paraissaient de toute façon ténues.
Par ailleurs, le fait que la Suisse organise fréquemment des élections à trois niveaux politiques implique que les candidat·es doivent constamment mobiliser des ressources pour leurs campagnes, tant au niveau humain que financier. Or le défi économique n’est pas négligeable, à la fois en lien avec le financement des campagnes, pour lesquelles les femmes peuvent avoir plus de difficultés à collecter des fonds – ce qui limite leur attractivité, et donc leur visibilité – mais également en raison des réseaux d’influence dont les femmes font moins partie (voire peuvent être exclues ?).
S’il est sinueux, c’est toutefois le chemin que choisissent de plus en plus de femmes, en s’engageant en politique, devenant ainsi de véritables modèles pour les générations à venir. Car ce n’est pas qu’une question de choix ou de « vocation » individuelle, c’est bien l’articulation entre le souhait de s’engager, les contraintes organisationnelles et les normes de la société qui déterminent la présence des femmes en politique et leur nombre sur les listes principales des partis. Sans compter que les codes et la culture du monde politique peuvent être un frein à la durée des carrières politiques féminines. Ainsi, afin de réaliser un changement significatif, une approche globale est nécessaire, impliquant des réformes politiques et des moyens financiers pour encourager l’égalité et la diversité. Car l’égalité de genre dans la politique ne profite pas seulement aux femmes, mais renforce la démocratie en garantissant une représentation diversifiée et équilibrée, source d’innovation et d’efficience.
Corédigé par : Nancy Duc et Fanny Berret